Victor de Chanville

Avocat au Barreau de Marseille

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Notion d'extension mesurée d'une construction existante


Catégorie : Droit de l'urbanisme

Par une réponse ministérielle publiée au journal officiel du Sénat du 6 juin 2014, la Ministre de l'égalité des territoires et du logement fait le point sur la notion d'extension mesurée ou limitée d'une construction existante.

 

       La définition de cette notion est avant tout intéressante pour les personnes souhaitant agrandir leur habitation située en zone agricole ou naturelle d'un plan d'occupation des sols ou d'un plan local d'urbanisme, où les constructions nouvelles à usage d'habitation sont la plupart du temps interdites (sauf en cas de lien avec une exploitation agricole ou forestière en général), seule l'extension des habitations existantes étant admise, mais de manière souvent limitée car devant être "mesurée".

 

       La Ministre rappelle ainsi qu'en vertu de la jurisprudence applicable une telle extension suppose:

- un minimum de contiguité (Conseil d'Etat, 25 avril 1990),

- l'agrandissement d'une seule et même surface bâtie (Cour administrative d'appel de Marseille, 17 octobre 2007),

- que l'extension soit d'une superficie inférieure à celle du bâtiment existant (Conseil d'Etat, 27 janvier 1995).

 

L'extension mesurée doit ainsi se révéler "subsidiaire par rapport à l'existant", plusieurs illustrations jurisprudentielles anciennes étant encore fournies par la Ministre.

 

       C'est l'occasion d'ajouter quelques précisions complémentaires, souvent fondées sur des décisions plus récentes, aux solutions précitées.

 

* Il convient d'apprécier l'importance des travaux "en fonction notamment de l'emprise, du volume ou de l'apparence de la construction projetée et non uniquement par rapport à la SHON existante" selon un arrêt de la Cour administrative d'appel de Lyon du 5 novembre 2013, ce qui rappelle que l'urbanisme n'est pas une science exacte et que des critères autres que mathématiques doivent être pris en compte dans le cadre de l'application des règles locales.

 

Il n'est dans ces conditions pas possible de qualifier de mesurée l'extension de seulement 20m² d'une habitation présentant une SHON de 162 m² mais qui conduit à doubler son emprise au sol et à augmenter considérablement son volume (même arrêt).

 

Le Conseil d'Etat avait déjà rendu des solutions similaires, notamment dans un arrêt du 18 novembre 2009 pour ce qui est de l'augmentation de l'emprise au sol ou encore dans une décision beaucoup plus ancienne du 23 février 1990 en ce qui concerne l'augmentation du volume du bâtiment.

 

* Mais la plupart du temps, la jurisprudence prend en compte la superficie de l'extension pour apprécier son caractère mesuré, ce qui est parfaitement compréhensible puisque l'extension ne s'accompagne pas toujours d'une augmentation de l'emprise au sol ou du volume de la construction.

 

Il a ainsi été jugé assez récemment que le projet prévoyant de doubler la superficie de la construction existante ne peut être qualifié d'extension mesurée (Cour administrative d'appel de Marseille, 7 mai 2012).

En revanche l'augmentation de moins de 30 % de la surface existante est bien mesurée (Conseil d'Etat, 18 novembre 2009).

 

       Au regard des décisions évoquées plus haut et d'autres rendues en la matière que je ne cite pas, il est difficile de dégager des principes constants puisque le Juge administratif adapte la solution aux différents cas.

 

Néanmoins,il peut être noté que toute augmentation de plus de 30 % de la surface existante est susceptible de se voir refuser la qualification de mesurée.

 

       Ainsi que le relève la Ministre en conclusion, "afin de clarifier cette notion, seul un pourcentage précisant la notion d'extension mesurée dans le document d'urbanisme, quand il existe, peut éviter les difficultés d'interprétation", cette remarque étant à mon sens parfaitement justifiée.

 

La clarification de cette notion ne paraît en effet pas inutile dès lors que de nombreux plans d'occupations des sols et plans locaux d'urbanisme autorisent une telle extension dans des zones inconstructibles ou soumises à de sévères limitations afin d'éviter qu'un nombre trop important d'autorisations de construire n'y soit délivrées.

 

C'est ainsi le cas en zone naturelle ou agricole comme cela a déjà été observé ci-avant.

 

Le fait que le document d'urbanisme définisse la notion d'extension mesurée qu'il autorise paraît indispensable, ou du moins fort utile, à au moins deux points de vue:

- meilleure protection de la zone sensible concernée,

- sécurité juridique renforcée pour les propriétaires ou acquéreurs potentiels de biens situés dans des zones concernées, ceux-ci pouvant déterminer immédiatement les possibilités de construire qui leur sont offertes; les contentieux relatifs à des permis de construire autorisant des extensions seraient également par hypothèse bien réduits.

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