Victor de Chanville

Avocat au Barreau de Marseille

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La distinction entre l'accès et la desserte du terrain d'assiette


Catégorie : Droit de l'urbanisme

La distinction entre l'accès et la desserte du terrain d'assiette

 

Par un arrêt du 7 octobre 2015, le Conseil d'Etat a rappelé qu'il convient, dans le cadre de l'instruction d'une demande d'autorisation d'urbanisme, de distinguer entre l'accès au terrain et la desserte de celui-ci par une voie publique ou ouverte à la circulation publique, ces deux notions pouvant être toutes deux concernées par les dispositions du règlement du plan local d'urbanisme (article 3).

 

Le plan local d'urbanisme prévoit en général que le terrain d'assiette de la construction (c'est à dire la parcelle sur laquelle a été accordée une autorisation d'urbanisme, par exemple un permis de construire) soit desservie par une voie publique ou une voie ouverte à la circulation publique : c'est la desserte.

 

Mais, afin de pouvoir accéder à cette voie de desserte, le terrain doit y être raccordé, soit qu'il débouche directement dessus, soit qu'il y soit relié par une voie privée, éventuellement grevée d'une servitude de passage au bénéfice du propriétaire de la parcelle d'assiette : c'est l'accès.

 

La distinction peut être malaisée dans certains cas, notamment celui (évoqué par le Conseil d'Etat par exemple dans des arrêts du 9 mai 2012 et du 26 février 2014) où l'accès à une voie publique n'est possible que par l'intermédiaire d'une voie privée sur laquelle le pétitionnaire n'a aucun droit de passage mais ouverte à la circulation publique : dans ce cas, le Conseil d'Etat estime que l'accès existe et que le juge n'a pas à vérifier l'existence d'un titre de passage.

 

Pour revenir à l'arrêt du 7 octobre 2015, la situation était la suivante : le plan local d'urbanisme prévoyait dans son article UD 3 relatif aux conditions de desserte des terrains que, pour être constructible, un terrain doit avoir un accès à une voie existante ou à créer, publique ou privée ouverte à la circulation automobile et en état de viabilité ;

ce document ajoutait toutefois qu'aucune nouvelle voie privée ou appendice d'accès, à l'exception de celles situées dans les opérations de constructions groupées, ou lotissements ne sera autorisée, l'annexe au règlement définissant la voie privée comme une voie ouverte à la circulation desservant, à partir d'une voie publique, une ou plusieurs propriétés dont elle fait juridiquement partie, généralement sous forme de copropriété.

 

Cela a amené la Cour administrative d'appel à considérer que, dans la mesure où le terrain d'assiette était relié à la voie publique par l'intermédiaire d'une servitude de passage non encore aménagée et ne constituant donc pas une voie privée au sens des dispositions précitées, le terrain devait être considéré comme non constructible pour ne pas être desservi par une voie publique sans création d'une voie privée nouvelle.

 

Le Conseil d'Etat a censuré la décision de la Cour au motif que :

« Il résulte de ces dispositions du règlement du plan local d'urbanisme de Dammartin-en-Goële que, pour être constructible, un terrain doit disposer d'un accès à une voie publique ou privée ouverte à la circulation automobile et en état de viabilité et que cet accès doit, par ses caractéristiques, permettre d'assurer la sécurité des usagers, ainsi que la défense contre l'incendie et la protection civile. Ces dispositions ne font pas obstacle à ce que l'accès consiste en un passage aménagé sur un fonds voisin, dès lors que ce passage satisfait aux exigences de sécurité, de défense contre l'incendie et de protection civile, et n'imposent pas qu'il soit lui-même constitutif d'une voie privée ouverte à la circulation automobile ».

 

Autrement dit, le Conseil a distingué entre les notions de desserte et d'accès en indiquant que la voie d'accès n'a pas, par hypothèse, à présenter les caractéristiques de la voie de desserte et donc, dans le cas d'espèce, à être ouverte à la circulation publique.

 

 

Cette solution paraît conforme au droit mais aussi à l'équité puisqu'il paraît difficilement concevable qu'un document d'urbanisme réglemente la constitution de servitude de droit privé et ait pour conséquence de rendre inconstructibles des terrains pouvant être désenclavés par la création de voies d'accès aux caractéristiques conformes aux exigences des dispositions d'urbanisme applicables.

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